La motricité manuelle au service des premiers apprentissages en mathématiques, un facteur décisif pour tous ?
Nathalie Bonneton-Botte  1@  , Fanny Ollivier  2  , Hélène Hili  3  , Stéphanie Quirino-Chaves  4  , Nadège Saliot  5  
1 : Centre de Recherches en Psychologie, Cognition et Communication  (CRPCC)  -  Site web
Université Rennes 2 - Haute Bretagne : EA1285, Université de Bretagne Occidentale [UBO] : EA1285
UBO, Brest -  France
2 : Laboratoire de Psychologie : Cognition, Comportement, Communication
Université de Rennes 2 : EA1285
3 : Institut national supérieur du professorat et de l'éducation
Université de Brest Occidentale (UBO)
4 : CREAD
Uniité de Rennes 2
5 : INSPE
Université de Bretagne Occidentale (UBO)

Le recours aux mains et aux doigts est aujourd'hui reconnu comme déterminant dans la construction des premières habiletés mathématiques chez l'enfant (Guedin, Thevenot, Fayol, 2018 ; Ollivier, Bonneton-Botté, Noël, 2019 ; Seron & Crollen, 2018). Si l'origine phylogénétique ou ontogénétique de cette relation fait débat (cf. Seron & Crollen, 2018), le rôle de l'apprentissage lui-même est assez peu considéré, les recherches interventionnelles en psychologie de l'éducation restant rares sur ces questions. Moeller, Martignon, Wessolowski, Engel and Nuerk (2011) regrettent d'ailleurs une absence de dialogue entre mathématiciens et chercheurs en psychologie et formulent le vœu d'un meilleur dialogue entre les disciplines afin que des dispositifs d'enseignement prometteurs soient conçus à partir d'approche pluridisciplinaire.

A l'école, les habiletés manuelles des enfants sont quotidiennement sollicitées, en particulier lorsqu'il s'agit de raisonner sur des quantités ou sur des nombres (e.g., dénombrement, énumération, manipulation d'objets de collection à quantifier, comptage ou calcul). Ces sollicitations diverses en situation d'apprentissage scolaire impliquent que la motricité manuelle de l'enfant soit relativement opérationnelle c'est-à-dire que ses actions motrices soient suffisamment rapides et précises pour répondre aux exigences de la tâche et au rythme imposé par le collectif de la classe. Dans une perspective inclusive, la diversité des rythmes de développement au sein d'une classe peut cependant laisser supposer que tous les enfants ne sont pas en mesure d'utiliser leurs mains de la même façon au cours d'une tâche qui leur est proposée.

Deux recherches associant chercheuses, formatrices et acteurs de terrain ont cherché à préciser le rôle de la motricité manuelle dans l'usage des doigts en mathématique chez des élèves avec développement typique ou atypique. La première étude, de type interventionnelle, mesure le bénéfice d'un dispositif d'enseignement et d'entraînement à l'usage des doigts sur les premières habiletés en calcul chez une centaine d'élèves de grande section. En considérant les capacités motrices manuelles initiales des élèves, les résultats indiquent que l'enseignement de l'usage des doigts en maternelle ne bénéficie pas à tous les enfants de la même façon. La seconde étude, initiée dans le cadre d'un Lieu d'Education Associé (LéA-IFé), explore les habiletés motrices en contexte mathématique de 56 élèves âgés en moyenne de 11 ans et présentant un trouble du développement intellectuel. Les données obtenues à l'occasion d'un pré-test réalisé avant un dispositif d'entraînement permettent d'établir que les élèves avec trouble du développement utilisent fréquemment les doigts en situation mathématiques. Comme pour les élèves au développement typique, la motricité manuelle des élèves apparaît comme un facteur décisif de la réussite à certaines tâches mathématiques.

MOTS-CLÉS
Développement typique et atypique, usage des doigts, calcul, motricité manuelle.

ABSTRACT
Manual motor skills at the service of early learning in mathematics, a decisive factor for everyone?

The use of hands and fingers is now recognized as a determinant in the construction of children's first mathematical skills (Guedin, Thevenot, Fayol, 2018; Ollivier, Bonneton-Botté, Noël, 2019; Seron & Crollen, 2018). While the phylogenetic or ontogenetic origin of this relationship is a matter of debate (cf. Seron & Crollen, 2018), the role of learning itself is given relatively little consideration, as intervention research in educational psychology remains rare on these issues. Moeller, Martignon, Wessolowski, Engel and Nuerk (2011) regret the lack of dialogue between mathematicians and researchers in psychology and express the wish for a better dialogue between disciplines so that promising teaching devices can be designed from a multidisciplinary approach.

At school, children's manual skills are called upon on a daily basis, particularly when it comes to reasoning about quantities or numbers (e.g., counting, enumerating, handling collectibles to be quantified, counting or calculating). These various demands in a school learning situation imply that the child's manual motor skills must be relatively operational, i.e. that his motor actions must be sufficiently fast and precise to meet the requirements of the task and the rhythm imposed by the class group. From an inclusive perspective, however, the diversity of developmental rhythms within a class may suggest that not all children are able to use their hands in the same way during a task that is offered to them.

Two studies involving researchers, trainers and field workers have sought to clarify the role of manual motor skills in the use of fingers in mathematics in students with typical or atypical development. The first study, of an interventional type, measured the benefit of a finger teaching and training device on the first numeracy skills in about a hundred kindergartens last year. Considering the students' initial manual motor skills, the results indicate that teaching finger use in kindergarten does not benefit all children in the same way. The second study, initiated within the framework of a Lieu d'Education Associé (LéA-IFé), explores the motor skills in a mathematical context of 56 students with an average age of 11 years and presenting an intellectual development disorder. The data obtained during a pre-test conducted before a training device allows us to establish that students with a developmental disability frequently use their fingers in mathematical situations. As with typically developing students, the manual motor skills of the students appear to be a decisive factor in the success of certain mathematical tasks.

KEYWORDS
Typical and atypical development, use of fingers, arithmetic, manual motricity.

REFERENCES

Guedin, N., Thevenot, C., & Fayol, M. (2018). Des doigts et des nombres. Psychologie Française, 63(4), 379-399.

Moeller, K., Martignon, L., Wessolowski, S., Engel, J., & Nuerk, H.-C. (2011). Effects of Finger Counting on Numerical Development ? The Opposing Views of Neurocognition and Mathematics Education. Frontiers in Psychology, 2. doi:10.3389/fpsyg.2011.00328

Ollivier, F., Noël, Y., Legrand, A., & Bonneton-Botté, N. (2019). A teacher-implemented intervention program to promote finger use in numerical tasks. European Journal of Psychology of Education. doi:10.1007/s10212-019-00441-9

Seron, X., & Crollen, V. (2018). Le comptage sur les doigts comme support au développement des capacités numériques et arithmétiques de base ? ANAE, 156, 531-537.


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