Géopolitique de l'école à Marseille
Aude-Line Gervais  1@  
1 : Temps, espaces, langages Europe méridionale-Méditerranée
Aix Marseille Université : UMR7303, Centre National de la Recherche Scientifique : UMR7303

En France, le « tournant néolibéral » de l'école (Felouzis et alii, 2013) lié au développement d'acteurs privés et au partage de la compétence scolaire entre différents échelons administratifs, de la commune à l'Etat, a favorisé la diversification des acteurs du champ scolaire (Laval, 2003). L'école, entendue dans une approche politique et géographique, à la fois comme l'institution scolaire et l'établissement scolaire allant de la classe maternelle au lycée, apparaît comme un espace co-construit par une pluralité d'acteurs, publics et privés, qui élaborent et mettent en œuvre des politiques éducatives à différentes échelles. Ces acteurs ont des représentations et stratégies scolaires différenciées. Ils investissent ainsi les territoires scolaires de manière inégale. A Marseille, par exemple, les établissements d'éducation prioritaire, qui accueillent un public scolaire très défavorisé, occupent une place centrale dans la politique éducative du Ministère de l'Education nationale alors qu'ils semblent être beaucoup moins prioritaires dans les choix éducatifs de la municipalité. Ces inégalités scolaires favorisent l'apparition de tensions entre acteurs et de potentiels conflits. En effet, la vétusté de certaines écoles maternelle et primaire des quartiers défavorisés de Marseille a notamment donné lieu depuis 2017 à des mobilisations de parents d'élèves parfois rassemblés dans des collectifs afin de dénoncer le sentiment d'abandon éprouvé par des élèves, professeurs et parents d'élèves qui habitent ces territoires scolaires délaissés et peu attractifs auprès de nombreux acteurs, que nous apparentons à des marges (Prost, 2004) scolaires. En quoi l'approche géopolitique, qui étudie les conflits entre acteurs autour du contrôle de l'espace, permet-elle d'analyser les inégalités scolaires à l'échelle de Marseille ?

Afin de questionner la pertinence de cette approche, nous nous proposons, en vue de ce colloque, de faire un bilan de la littérature scientifique liée à la géographie de l'éducation, la géographie urbaine et la géopolitique locale. Dans la perspective d'une approche méthodologique mixte, à la fois quantitative et qualitative, j'envisage également d'associer, à une lecture assidue d'ouvrages scientifiques, une analyse de documents institutionnels et une revue quotidienne de la presse. Ce travail s'inscrira dans le cadre d'une thèse de doctorat en géographie qui débutera à la rentrée universitaire 2020. Au cours du premier trimestre universitaire, j'envisage d'affiner mon terrain d'étude et de cibler un espace de conflits entre plusieurs acteurs sur lequel m'appuyer particulièrement pour discuter de la pertinence de l'approche géopolitique. Cette contribution au colloque me permettra de soulever le bien-fondé de cette approche dans l'analyse des inégalités scolaires à Marseille et constituera un point d'entrée nécessaire dans la thèse.

MOTS CLES
espace scolaire – politiques éducatives – inégalités – marges scolaires – Marseille – géopolitique – mobilisations collectives

ABSTRACT
In France, the school « neoliberal turn » (Felouzis et alii, 2013) enhanced by the emergence of private actors and a shared school competency between several administrative levels - from the municipality to the state - has fostered a diversification of actors in education (Laval, 2003). From a political and geographical standpoint, school is both understood as the institution and the place where children study from kindergarten to high school. It also seems to be a co-constructed space involving many actors, public and private, who elaborate and enforce educational policies at different levels. These actors' representations and strategies differ, which generates an inequal investment of school space. In Marseille for instance, the schools located in the zones of priority education - which receive a disadvantaged population - hold a central position in the policy of the Ministry of National Education while they seem to be less crucial in the educative policy of the municipality. These school inequalities foster tensions between actors and potential conflicts. Indeed, since 2017 in Marseille, the ramshackle buildings in some kindergarten and primary schools in disadvantaged neighbourhoods have been a reason for parents to actively demonstrate against the sense of abandonment felt by pupils, professors and the parents who inhabit these school territories unattractive and forsaken to most actors that could be considered as school margins (Prost, 2004). How does the geopolitical approach, which analyses conflicts between actors about the control of space, be particularly relevant to analyze school inequalities in Marseille?

To question the relevance of that approach, I will assess the scientific literature in geography of education, urban geography and local geopolitics. In the perspective of a mixed-method combining a quantitative and a qualitative approach, I will carefully analyze institutional documents and review press daily. This work will be done in the context of a Ph.D thesis from the start of the 2020 academic year. During the first semester, I plan on refining my field of survey to target one particular space of conflicts between many actors on which I could rely on to discuss the geopolitical approach. This contribution to the symposium will make me raise the relevance of geopolitics in the analysis of school inequalities in Marseille. That will be an essential entry point into my Ph.D thesis.

KEYWORDS
school space – educative policies – inequalities – school margins – Marseille – geopolitics – demonstrations

REFERENCES
Audren Gwenaëlle, Géographie de la fragmentation scolaire et territoires scolaires à Marseille, Université d'Aix-Marseille, Marseille, 2015, 522 p.
Ben Ayed Choukri, Le nouvel ordre éducatif local: mixité, disparités, luttes locales, Paris, Presses universitaires de France, 2015, 192 p
Felouzis Georges et al, Les marchés scolaires. Sociologie d'une politique publique d'éducation, Paris, Presses universitaires de France, Coll. « Education et société », 2013, 217 p.
Subra Philippe, Géopolitique locale : territoires, acteurs, conflits, Paris, Armand Colin, 2016, 336 p.


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