RÉSUMÉ
Cette communication présente une recherche-intervention, en cours, ayant pour objet l'évaluation du plan d'amélioration de la mixité sociale dans les collèges du département de la Haute-Garonne. La première phase de ce plan s'est traduite par la fermeture progressive de deux établissements REP+ du quartier du Mirail à Toulouse et au transfert des élèves sortant de CM2 vers onze collèges accueillant majoritairement des élèves issus de catégories sociales favorisées. La seconde phase a pour objet la construction de deux nouveaux établissements situés à la lisière d'une zone résidentielle économiquement favorisée et du Mirail afin de permettre l'accueil d'un public socialement mixte. Le concept de mixité sociale, mobilisé dans ce cadre, s'appuie sur les nombreuses recherches depuis Coleman (1966) qui pointent des effets « d'agrégation » néfastes liés au regroupement d'élèves aux origines sociales ou ethniques similaires dans un même établissement et à son impact sur les performances scolaires. Cette initiative, émanant du Conseil Départemental en charge de la sectorisation des collèges, a nécessité pour sa mise en œuvre la collaboration de nombreux acteurs hétérogènes : des institutions (nationales et locales), des associations de tailles variées et les publics concernés par la nouvelle sectorisation (collégiens et parents d'élèves issus de milieux sociaux distincts). Au regard de ce contexte, nous avons fait le choix de proposer une recherche de type participatif afin de conduire cette évaluation. Cette recherche vise à comprendre les phénomènes d'émancipation collective à travers la formation des valeurs et la formation par la détermination des valeurs. L'enjeu démocratique consiste à interroger le dispositif non pas seulement à travers des effets objectivés mais aussi à travers le récit que les participants en font sur le plan expérientiel. Nous étudierons les modalités de constitution du tiers espace socio-scientifique (Marcel, 2016) à partir duquel se déploie la démarche évaluative ainsi que les visées transformatives et émancipatoires qui le spécifient. Cet espace collaboratif, réunissant des acteurs du dispositif sur la base du volontariat, prend forme dans un comité de pilotage et des groupes de travail. Il se constitue également dans des temps spécifiques de formalisation de la commande, de coopération, de partage de connaissances et de restitution des résultats. Nous développerons notre propos en nous appuyant sur le modèle de l'enquête de Dewey et le modèle de la recherche-intervention (Broussal et al., 2015). Nous voulons mettre ici en lumière deux aspects de notre problématique quant à l'évaluation d'une intervention publique, à savoir : l'intégration des publics à la détermination de ce qui a de la valeur, et de ce qui serait à terme « le mieux » selon eux, et l'intégration des savoirs professionnels à la construction des connaissances. Nous soumettrons à la discussion l'hypothèse que l'évaluation est une voie possible d'émancipation collective, et en quoi le principe de double vraisemblance (Dubet, 1994) est contributif ici d'une nouvelle épistémologie unissant science et société dans une perspective démocratique. Ce dernier point, est d'autant plus essentiel qu'il interroge le rôle de l'évaluation tout autant que le rapport des sciences au politique en situation de collaboration.

MOTS-CLÉS
Recherche-intervention évaluative, mixité sociale, innovation, collège, collectivité territoriale

ABSTRACT
This communication presents a research-intervention project, currently underway, aimed at evaluating the plan to improve the social mix in the middle school of the Haute-Garonne department. The first phase of this plan has resulted in the gradual closure of two REP+ establishments in the Mirail district of Toulouse and the transfer of pupils leaving CM2 to eleven middle schools, mainly accommodating pupils from advantaged social categories. The purpose of the second phase is the construction of two new schools located on the edge of an economically favoured residential area and the Mirail district in order to allow social mixing of the population. The concept of social mix, used in this context, is based on the numerous studies since Coleman (1966) which point to harmful 'aggregation' effects linked to the grouping of pupils with similar social or ethnic backgrounds in the same establishment and its impact on school performance. This initiative, which came from the departmental council responsible for the sectorisation of lower secondary schools, required the collaboration of many heterogeneous players for its implementation: institutions (national and local), associations of varying sizes and the groups concerned by the new sectorisation (lower secondary school pupils and parents of pupils from different social backgrounds). In view of this context, we have chosen to propose a participative research in order to carry out this evaluation. This research aims to understand the phenomena of collective emancipation through the formation of values and training through the determination of values. The democratic challenge consists in questioning the system not only through objectified effects but also through the narration that the participants make of it on an experiential level. We will study the modalities of constitution of the third socio-scientific space (Marcel, 2016) from which the evaluative approach is deployed as well as the transformative and emancipatory aims which specify it. This collaborative space, bringing together the actors of the system on a voluntary basis, takes shape in a steering committee and working groups. It is also set up at specific times to formalise the order, cooperate, share knowledge and report on the results. We will develop our proposal based on the Dewey survey model and the research-intervention model (Broussal et al., 2015). Here, we wish to highlight two aspects of our problem with regard to the evaluation of a public intervention, namely: the involvement of the public in determining what is of value and what would ultimately be "best" according to them, and the integration of professional knowledge in the construction of knowledge. We will submit for discussion the hypothesis that evaluation is a possible path to collective emancipation, and how the principle of double plausibility (Dubet, 1994) contributes here to a new epistemology uniting science and society in a democratic perspective. This last point is all the more essential as it questions the role of evaluation as much as the relationship between science and politics in a collaborative situation.

KEYWORDS
Evaluative research-intervention, social mix, innovation, secondary school, local authority

REFERENCES
Aït-Ali, C., Fernandes, S. & Tali, F. (2014). L'enseignement agricole comme promesse d'une « nouvelle » trajectoire scolaire. Dans : Jean-François Marcel éd., Lycées agricoles en changement: Regards pluriels (pp. 25-42). Dijon cedex, France : Educagri éditions.
Broussal, D., Ponté, P. & Bedin, V. (Dir.) (2015). Recherche-Intervention et accompagnement du changement. Paris, France : L'Harmattan.
Dubet, F. (1994) Sociologie de l'expérience. Paris, France : Éditions du Seuil.
Marcel, J. (2016). La recherche-intervention par les sciences de l'éducation: Accompagner le changement. Dijon cedex, France: Educagri éditions. doi:10.3917/edagri.marce.2016.01.